Au Mali, tout commence par les salutations.
source Youtube
« Bonjour » (Anisogoma, Aniclé, Anoula, Anissou) est le point de départ. La salutation de toute ta lignée est le point de chute. C’est donc à ce moment qu’arrive le fameux « Y KEÏTA » ou « Y DIALLO » ou autre …
« En Afrique traditionnelle, l’individu est inséparable de sa lignée, qui continue de vivre à travers lui et dont il n’est que le prolongement. C’est pourquoi, lorsqu’on veut honorer quelqu’un, on le salue en lançant plusieurs fois non pas son nom personnel (ce que l’on appellerait en Europe le prénom) mais le nom de son clan : « Bâ ! Bâ ! » ou « Diallo ! Diallo ! » ou « Cissé ! Cissé ! » car ce n’est pas un individu isolé que l’on salue, mais, à travers lui, toute une lignée de ses ancêtres. »
Amkoullel, l’enfant peul, Amadou Hampâté Bâ
Dans mon cas « Y KEÏTA » revient à saluer mon père, ma mère, mes grands-parents et surtout mes ancêtres. Pour être précise, étant une femme, on aura tendance à me dire « Y SOUKO » qui est l’équivalent féminin de « Y KEÏTA ». Le premier de mes ancêtres est ce fier et brave roi guerrier nommé Soundiata KEÏTA. Soundiata KEÏTA est le fondateur du plus grand empire de l’Afrique de l’Ouest, l’empire du Mandé. D’ailleurs, un dessin animé retraçant son épopée est disponible sur Youtube : « Soundiata KEÏTA, le réveil du lion » .
Lorsque j’entends le « Y KEÏTA », je bombe la poitrine car je suis envahie de fierté. Toute petite, j’y ai vu des enjeux et j’y ai associé des notions d’honneur, de courage, de respect et d’humilité. Alors durant mes études, au travail ou lors d’entretiens quand certains m’ont acidentellement appelée KEÏTA, je ne m’en suis jamais offensée, bien au contraire. Par ailleurs, si je peux garder mon nom de jeune fille lorsque je serai mariée, je ne dis pas non !
Je vous fais part d’une anedocte, plus jeune, il m’arrivait d’avoir dû mal à finir une course alors il me suffisait de penser à mes ancêtres et hop je vous assure que je courais sans sourciller. Ce n’était pas « COURS FORREST COURS ! » qui résonnait dans ma tête mais plutôt « COURS KEÏTA COURS ! ».
Dans les moments de difficultés pour me donner du courage, je me remémore ce que cela implique d’être une KEÏTA.
Voici quelques exemples de personnalité ayant le patronyme « KEÏTA » :
Bien évidemment, cette liste est non exhaustive. Il y a un bon nombre de KEÏTA ayant accompli à leur échelle des prouesses qui méritent d’être contées et louées par les griots de chez nous.
En y repensant, l’immigration est d’autant plus dure d’autant plus que tu quittes ton pays, ta culture mais aussi ton identité et ton histoire. Cette exode implique malheureusement d’être réduit à l’anonymat. Dans ton nouveau pays, on ignore ton passé, ton histoire et on ignore sûrement que tu descends d’une famille royale qui n’a rien à envier au roi Soleil.
Oudy K.